Saison 1978-1979
Une autre saison dans l'AMH pour les Nordiques, impatients de faire le saut dans la LNH. Celle-ci accepte finalement de fusionner avec le circuit maudit en mars 1979.

En juin 1978 à Détroit, la deuxième série de négociations en vue d'une éventuelle fusion entre l'AMH et la LNH se solde par un nouvel échec. Les propriétaires des clubs du circuit maudit refusent les conditions draconiennes imposées par la LNH, déterminée à récupérer tous ses joueurs qui travaillent dans la ligue rivale. Limitée à sept clubs après le départ des Aeros de Houston, l'AMH doit porter un grand coup et décide de s'accaparer les meilleurs espoirs du hockey amateur canadien. Les Bulls de Birmingham mettent la main sur Pat Riggin, Rick Vaive, Craig Hartsburg, Rob Ramage, Gaston Gingras et Michel Goulet; Mike Gartner se joint aux Stingers de Cincinnati; enfin, les Racers d'Indianapolis font l'acquisition du talentueux Wayne Gretzky, âgé de seulement 17 ans.

À Québec, les Nordiques embauchent deux beaux espoirs du hockey junior québécois, Danny Geoffrion et Richard David. Les Fleurdelisés accueillent également Gilles «Bad News» Bilodeau, Dale Hoganson, le gardien Louis Levasseur et l'entraîneur Jacques Demers, de retour au Québec après des séjours à Chicago, Indianapolis et Cincinnati. L'un des joueurs les plus bizarres de l'histoire du hockey, le gardien Gilles Gratton, offre ses services aux Nordiques mais sans succès. Persuadé d'être la réincarnation d'un soldat du XVIe siècle, Gratton a déjà couru tout nu sur une patinoire, portant son masque, lors d’une séance d’entraînement avec les Toros de Toronto!!!

À leur deuxième série de matches hors-concours contre des clubs de la LNH, les Fleurdelisés sont battus par les Capitals de Washington mais remportent la victoire face aux Rockies, aux North Stars, aux Penguins, aux Blackhawks et aux Rangers. Bien que tous ces matches aient eu lieu au Colisée, la preuve est faite que la place des Nordiques est dans la Ligue nationale. Le gardien Gilles Meloche est convaincu que le club québécois se débrouillerait facilement dans la LNH, contrairement au défenseur Rod Langway qui affirme que l'AMH est encore plus faible que la Ligue américaine. Déclaration étrange puisque le défenseur des Canadiens avait choisi de commencer sa carrière dans l'AMH en 1977-1978.

Les Nordiques connaissent un piètre début de saison mais se hissent au premier rang de la ligue au début de novembre avec cinq victoires de suite. Au bord de la faillite, les Racers d'Indianapolis cèdent Wayne Gretzky aux Oilers d'Edmonton le 2 novembre avant de fermer boutique à la mi-décembre. Pendant ce temps, à Québec, Christian Bordeleau annonce sa retraite le 12 novembre. Complètement épuisé par son double emploi de fermier et hockeyeur, Bordeleau revient toutefois sur sa décision et tente de reprendre son poste au sein du club. La direction des Nordiques refuse — Richard Leduc a joint l'équipe entre-temps — et Bordeleau poursuit le club pour 179 000 $. Le litige se règle par une entente à l’amiable à la fin de la saison.

À quelques semaines de la reprise des pourparlers de fusion avec la LNH, le moral est à zéro dans la Vieille Capitale. On raconte que la brasserie O'Keefe hésiterait à investir les millions de dollars requis pour le passage des Nordiques à la LNH. En tournant le dos au circuit Ziegler, la brasserie empocherait une indemnité de trois ou quatre millions, comme les clubs de Cincinnati et Birmingham. Est-ce la dernière saison des Nordiques? Évidemment, O'Keefe nie la rumeur. Mais comment joindre les rangs de la LNH sans un Colisée de 15 000 sièges, condition imposée par John Ziegler? Contre toute attente, Marcel Aubut réussit à obtenir la collaboration des trois niveaux de gouvernement, y compris la ville de Québec, qui déboursent 15 millions pour l'agrandissement de l'amphithéâtre.

Les négociations entre l'AMH et la LNH avancent rondement et les deux parties en viennent à une entente. Les propriétaires des clubs de la LNH se réunissent à Key Largo (Floride) le 8 mars 1979 pour entériner le projet de fusion; l'accord de 13 des 17 propriétaires est requis pour l’adopter. Douze seulement se montrent intéressés. À la surprise générale, Montréal vote contre le projet et bloque ainsi l'entrée des Nordiques, des Oilers, des Jets et des Whalers dans la LNH. Pourtant, le grand Jean Béliveau s'était rendu à Québec quelques semaines plus tôt pour assurer à la population que les Canadiens allaient voter pour la fusion. Furieux, les dirigeants de l'AMH promettent de mettre sur pied une division européenne pour se venger de la LNH.

Que s'est-il donc passé à Key Largo? De toute évidence, Montréal, Toronto et Vancouver ont refusé de partager les revenus de la télévision canadienne avec Edmonton, Winnipeg et Québec. Les droits de télévision sont détenus par la brasserie Molson, propriétaire des Canadiens de Montréal. On croit que Molson a tenté d'écarter sa rivale, la brasserie O'Keefe, propriétaire des Nordiques. Molson proteste et assure que Montréal a voté contre la fusion parce que les conditions étaient inacceptables pour le Tricolore. Apprenant que des amateurs de Québec, d’Edmonton et de Winnipeg organisent un boycott de ses produits, la brasserie Molson demande à la LNH de reprendre immédiatement les pourparlers de la fusion. Finalement, après une dernière série de négociations, les Nordiques font officiellement leur entrée dans la Ligue nationale le 30 mars 1979.

En attendant la fusion, les Nordiques complètent tant bien que mal leur dernière saison dans l'AMH. Le 18 mars, à Edmonton, le club compte tellement de blessés que l'entraîneur Jacques Demers est forcé d'enfiler l'uniforme fleurdelisé — un peu trop serré — durant la séance de réchauffement d'avant-match. Les Nordiques terminent au second rang de la ligue avec 87 points, 11 points derrière Edmonton. Mais c'est un club divisé qui affronte les Jets de Winnipeg au premier tour: un énorme fossé s'est créé entre les vedettes de l'équipe et les «plombiers» comme Bob Fitchner et Curt Brackenbury. On se chamaille autour de l'argent des éliminatoires. Durant un exercice, Brackenbury s'en prend à Serge Bernier sous les encouragements de Fitchner. Le club québécois est éliminé en quatre matches par les Jets, quatre raclées consécutives de 6 à 3, 9 à 2, 9 à 5 et 6 à 2.

Cette élimination honteuse fait oublier la remarquable saison de Réal Cloutier, auteur de 75 buts en 77 rencontres. La direction des Nordiques promet un grand ménage pour briser l'influence des «cliques» dans le vestiaire, mais elle décide plutôt de consacrer toutes ses énergies à préparer l'entrée du club dans la LNH. Les Jets de Winnipeg remportent la dernière coupe Avco de l'histoire de l'AMH, exploit qui leur vaut le privilège de garder un exemplaire du trophée en permanence au Winnipeg Arena. Le beau projet de deux Californiens se termine après sept saisons et une véritable fortune engloutie par les divers propriétaires d’équipes: on parle de 50 millions de dollars jetés par la fenêtre.

Voir aussi
Profil: Marcel Aubut
Souvenir: La fusion AMH-LNH
Statistiques, saison 1978-1979
Sommaire: dernier match dans l’AMH
Cartes Sportscaster, saison 1978-1979
Magazines, saison 1978-1979
Photo d'équipe, saison 1978-1979


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